Othercide

Dans un monde au-delà de notre réalité, une créature est sur le point de naître : Souffrance. Menaçant d’engloutir l’Irréel et d’atteindre notre monde, une combattante appelée Mère tente de la détruire. Ayant échoué, c’est maintenant au tour de ses filles, les Sœurs, de reprendre le flambeau et vaincre Souffrance et ses enfants, les Autres. Si ça vous paraît saugrenu et que ça vous intrigue, bienvenue dans le monde étrange d’Othercide, un jeu de stratégie au tour par tour perché, mais pas dénué d’intérêt.

Développeur : Lightbulb Crew
Éditeur : Focus Home Entertainment
Date de sortie : 28 juillet 2020
Plateformes : PC, PS4, Xbox One, Switch
Genre : Stratégie au tour par tour, Rogue-lite

Telle Mère, telles Filles

L’histoire est quelque peu énigmatique : se passant dans un monde parallèle au nôtre, Othercide voit un combat entre (grosso-modo) le bien et le mal – ou l’espoir et les ténèbres, voire la vie et la mort. Ce combat a des conséquences sur le monde réel, puisque si nos ennemis l’emportent, les humains seront condamnés à une existence de souffrance éternelle. Mère, la guerrière la plus puissante de l’histoire, échoue une première fois face à ce mal ; son esprit donne à présent vie à des combattantes de fortune qui, elle l’espère, parviendront à retourner la situation.

Point positif tout de même : les cinématiques transpirent le style.

Point négatif du jeu à mon sens, le scénario est trop obscure, pas assez explicite. On sait qu’on combat des méchants – après tout le boss final s’appelle littéralement Souffrance – mais les tenants et aboutissants de cette guerre sont quelque peu… abstraits. Et cela ne va pas en s’améliorant. Pourquoi affronte-t-on des docteurs de la peste ? Pourquoi les zones d’affrontement sont appelées des synapses ? Qui est cette « Mère » qui donne vie aux personnages que l’on joue ? Othercide ne donne malheureusement que très peu d’explications pour justifier l’univers dans lequel on évolue, ce qui est bien dommage. On perçoit des thèmes comme la violence médicale, religieuse ou encore patriarchale, nos adversaires n’étant que des hommes s’attaquant à des femmes – et n’hésitant pas à sexualiser de façon très malsaine les Sœurs que l’on incarne – mais le reste n’est pas clair. Le jeu n’a pas besoin d’un scénario poussé vu son gameplay réussi, mais une bonne histoire pour justifier le tout aurait été bienvenue.

Âmes en souffrance

Othercide est un jeu de stratégie au tour par tour (Turned-based strategy ; abrégé TBS) qui intègre des éléments de rogue-lite. Pour être plus clair, il sera nécessaire, ou du moins fortement recommandé, de recommencer l’aventure à plusieurs reprises afin de profiter de bonus sur le long terme.

Quelques écueils tout d’abord, le jeu n’est pas exempt de bugs, notamment des ennemis qui attaquent nos personnages à très longue distance… avec un coup au corps à corps, ce qui peut s’avérer frustrant puisqu’aucune stratégie ne permet de s’en protéger. Un autre point à souligner est que l’interface est clairement pensée pour la manette, et qu’elle n’est pas très pratique à utiliser au clavier et à la souris.

Le jeu regorge cependant de qualités. Comme la plupart des jeux du genre, Othercide se compose en deux phases : la gestion de nos personnages et les combats. Dans la première, on s’occupe des Sœurs et de leurs capacités. On peut débloquer des compétences grâce à l’expérience accumulée, conférer des bonus divers à ces dernières, ainsi qu’obtenir de nouvelles combattantes, ressusciter celles qu’on a perdu et soigner celles qui sont blessées. Les améliorations et la création de nouvelles Sœurs coûtent de la Vitalité, une monnaie obtenue à la fin de chaque mission en même temps que l’expérience. Redonner vie à l’une de nos soldates se fait en dépensant un jeton de résurrection, que l’on gagne en réalisant des missions de sauvetage. Enfin, dernière subtilité, on ne peut soigner une Sœur qu’en sacrifiant une autre de niveau équivalent ou supérieur. Dès lors, Othercide attache une grande importance aux choix que l’on fera pour maintenir en vie – ou non – nos combattantes.

Il sera impératif de sacrifier nos Sœurs pour soigner les autres.

Les combats quant à eux sont relativement classiques, comparés aux autres jeux du genre. Imaginez, grossièrement, un XCOM centré sur le corps à corps. Chaque personnage, Sœurs comme ennemis, ont un niveau d’initiative qui détermine qui agit quand. Ainsi, on ne joue pas systématiquement toutes nos Sœurs avant que les Autres attaquent, les tours sont souvent entremêlées et il est alors nécessaire de prévoir ses coups en conséquence. Pour rendre les combats plus clairs, une timeline au bas de l’écran nous aide à visualiser l’ordre dans lequel se dérouleront les tours et les attaques. Certaines capacités ont des effets différés, et la timeline permet de se rendre compte de quand elles auront effectivement lieu, ce qui est pratique à la fois pour planifier ses attaques et réagir à celles de nos adversaires. Les actions coûtent des PA (points d’action). Les Sœurs ont par défaut 100 PA, et peuvent en utiliser la moitié sans conséquence. Si elles dépensent plus de 50 PA en un tour, en revanche, elles sont placées à l’extrémité de la timeline et resteront injouables – et donc souvent vulnérables – pendant deux fois plus de temps que d’habitude. Pour formuler ça autrement, elles passent un tour. À nous donc de gérer efficacement les PA que l’on utilise et à faire attention aux actions des ennemis.

Comme dans la plupart des TBS, on se déplace sur un damier.

Othercide est un rogue-lite dans la mesure où, si l’on échoue lors d’un combat de boss, si notre dernière Sœur meurt, on si l’on décide de mettre fin à notre partie actuelle sans qu’une de ces conditions ne soit remplie, la partie n’est pas finie : elle reprend simplement depuis le début. Avant de tout recommencer, on peut dépenser une deuxième monnaie que l’on gagnait à la fin des missions mais qui étaient jusqu’alors inaccessible afin d’obtenir des bonus qui s’appliqueront à toutes nos Sœurs en simultané. Par exemple, toutes nos Sœurs profitent de 55% de points de vie en plus, ou font plus de dégâts à une certaine catégorie d’ennemis, etc. Cela rend donc la nouvelle partie que l’on entreprend plus facile. L’aspect rogue-lite se manifeste aussi par le fait qu’une Sœur décédée dans une partie peut être ressuscitée dans une autre. Ainsi, nos meilleures soldates ne sont jamais vraiment perdues et peuvent revenir à tout moment ; la mort et l’échec font donc partie intégrante de la progression.

Les bonus que l’on peut obtenir en recommençant l’aventure.

Sin City style

Othercide présente une esthétique sombre et monochrome, se parant de ses plus beaux noirs, blancs et nuances de gris. En ressort le rouge, seule couleur mise en avant, vif et agressif, laissant pleinement ressortir l’action et la violence du monde dans lequel on évolue. Les animations sont dynamiques et nos Sœurs transpirent le style dans leurs mouvements. Les ennemis sont hideux, repoussants, malformés, comme ils devraient l’être, puisqu’ils représentent tous les travers de l’être humain et sa cruauté, tantôt médicale que religieuse, avec un visuel jouant sur la corruption de la chair et des corps, devenant monstrueux.

Des ennemis… charmants. Et monstrueux.

Ambiance métal

Point fort du jeu, sa bande-son. C’est elle qui m’a introduite au jeu grâce aux recommandations de Spotify. Autant dire que la musique est d’excellente facture : profitant de la collaboration de plusieurs artistes, elle propose tantôt des pistes instrumentales glauques et stressantes, tantôt de véritables chefs-d’œuvre de métal épique accompagnés de chants. Ces morceaux sont souvent joués lors des combats de boss, ce qui les rend d’autant plus mémorables. Variée et percutante, la bande-son justifie presque à elle seule de se pencher sur Othercide, ne serait-ce que pour découvrir son univers audiovisuel.


Le groupe parisien Solitaris a composé deux incroyables morceaux exclusifs pour Othercide.

D’ailleurs, c’est toujours les Autres qui meurent

La progression rogue-lite fait qu’on parviendra inévitablement, même si l’on n’est pas adepte de TBS, à vaincre Souffrance. Le jeu est ainsi relativement peu frustrant, malgré son côté punitif avec des ennemis qui peuvent tuer une Sœur en deux coups, ce qui est un point très appréciable. De plus, la nécessité de mourir et d’échouer pour progresser rend l’échec plutôt bénin, nous renforçant plutôt que nous enfonçant. De par ses mécaniques solides accompagnées d’animations dynamiques, l’action est toujours présente, et Othercide est constamment jouissif. Rajoutez à cela une bande-son de qualité et une patte graphique singulière, et vous avez là la recette d’un jeu réussi, malgré son scénario opaque.

Pour Contre
+ Les visuels noir et blanc sublimes L’histoire difficile à comprendre
+ La musique variée de qualité Quelques bugs frustrants
+ La progression originale pour un TBS Les interfaces pas très sexy au clavier
+ Un gameplay solide et stratégique
+ L’importance des choix

Ante

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