Pokémon Go : Un oeil extérieur

Pokémon, le phénomène des années 90 qui a traversé bientôt deux décennies comme l’une des licences de jeu vidéo les plus reconnaissables et les plus populaires au monde. La réalité augmentée, technologie encore en développement qui se rapproche à vue d’oeil d’une véritable naissance commerciale dont l’éclatement marquera l’entrée dans une nouvelle ère vidéoludique. Combinez les deux et vous obtiendrez Pokémon Go. Ceci n’est pas un test mais bien un point de vue extérieur sur cette tempête qui fait vibrer non seulement le monde des joueurs, mais également le monde dans son ensemble.

Développeur: Niantic Labs
Date de sortie: 5 juillet 2016
Plateformes: iOS, Android
Genre: Jeu en Réalité Augmentée

Plus emblématique c’est difficile.

Qu’est-ce que Pokémon Go?

Si vous vivez sous un caillou, ou si vous étiez simplement en vacances lorsque Pokémon Go a commencé à sévir, il est éventuellement possible que vous soyez retourné au bercail un peu déboussolés en voyant tous vos amis poser leur verre pendant une soirée afin d’attraper un Nosferapti qui passait par là. Pokémon Go répond au rêve d’une génération entière d’enfants (maintenant jeunes adultes); celui de devenir dresseur de Pokémon et de tous les attraper. Le jeu fonctionne sur des mécanismes très simples : des Pokémon sont éparpillés aléatoirement sur les lieux réels de notre planète et c’est au joueur de se déplacer « IRL » pour aller les attraper à l’aide des pokéballs qu’il n’est plus nécessaire de présenter. Le jeu passe alors dans un mode à la première personne et le Pokémon apparait sur l’écran comme s’il se tenait droit devant le joueur, s’engage alors un mini jeu très typique des applications pour smartphones où le but est de toucher le Pokémon avec la pokéball afin de l’attraper, aucun combat n’est donc nécessaire. Je vous passerai les détails concernant les PokéStops, les arènes, les équipes et autres mécaniques du jeu. Le concept est détonant et inédit, j’en suis convaincu, mais ce n’est pas à lui que nous allons nous intéresser dans cette chronique.

Les chiffres

Pokémon Go bat des records, et ce dans plusieurs catégories. En moins d’un mois, plus de 50 millions de personnes ont téléchargé l’application (qui est, d’ailleurs, gratuite). Cela signifie donc que l’application est installée sur plus de 5% des smartphones dans le monde, dépassant Twitter, Snapchat, Tinder et même WhatsApp. Non content de les dépasser, Pokémon Go alimente également certaines de ces applications. En effet, plus de 20 millions de tweets et 130 millions de vidéo sur Vine ont été répertoriées depuis la sortie de l’application. Le jeu constitue aussi une application très active, on compte une moyenne de 43 minutes par jour passées sur Pokémon Go, ils doublent là aussi les plus grands réseaux sociaux.

D’un point de vue financier, c’est une folie spéculative qui s’est engagée. Nintendo gagne 93,2% de valeur boursière en une semaine après la sortie du jeu. Plus tard, elle chutera cependant de 18% quand Nintendo annoncera dans un communiqué de presse qu’ils n’ont pas participé au développement du jeu. Les derniers chiffres estiment que l’application rapporte un peu plus de 1,6 millions de dollars par jour au développeur Niantic, et ce uniquement sur iOS.

Le jeu obtient un beau 18/20 de la part de jeuxvideo.com ainsi qu’une note de 7/10 par IGN. L’accueil critique semble donc également terrain conquit.

Comment?

Malgré de gros problèmes de serveurs, surtout lors des premiers jours après la sortie du jeu, la plupart des joueurs décrivent l’application comme une expérience sociale intéressante et un jeu très addictif. J’ai vu des amis, habituellement très peu joueurs, s’affoler sur l’apparition d’un Carapuce dans mon salon. La réalité est difficile à admettre mais elle est évidente : ce n’est pas un jeu de la franchise Pokémon. Au même titre que les cartes à jouer ou le dessin animé, il s’agit d’un produit dérivé qui obtient un succès fracassant, rien de plus, rien de moins. Et cela n’a rien d’étonnant. En effet, Pokémon représente un phénomène de popularité sans égal depuis vingt ans. Joueur ou non, tout le monde a entendu parler de Pokémon, cette licence a touché plus de générations et de domaines que n’importe quelle autre licence de jeu vidéo. Le choix était logique, l’impact l’est aussi.

Un véritable phénomène de foule

Les gens deviennent fous

Pokémon Go, c’est le monde réel mixé avec le monde virtuel. Certains geeks cloîtrés devant leur ordinateur depuis des années sortent maintenant dans les rues pour attraper des Pokémon et ainsi rencontrent d’autres joueurs et parfois échangent socialement avec eux. Pour certains, ceux qui vivent à plein temps dans le monde virtuel, c’est dans cet aspect social que réside la véritable aventure. Pokémon Go comme outil de combat contre la dépression et l’isolement social, pourquoi pas? Mais qu’en est-il du monde que l’on appelle réel? Ou tout du moins celui que nous considérons comme la réalité, car le débat de ce qui est réel et ce qui ne l’est pas constitue une toute autre discussion. Ayant certaines difficultés à prendre parti, je vais simplement citer des exemples qui font débat autour du globe.

  • Le doute plane déjà autour de la confidentialité de l’application par rapport aux informations personnelles des joueurs. Article à voir sur le volet français de l’agence de presse russe Sputnik ici.
  • Les Pokémon sont partout… vraiment. Et malheureusement certaines choses auraient pu être évitées par de la simple programmation. Des sites mémoriaux tels que celui d’Auschwitz ou des attentats du 11 septembre à New York? Des autoroutes? Des zones de guerres en Irak? Ces endroits vous semblent-ils adaptés à la chasse aux Pokémon? Un top 5 un peu glauque à visionner ici.
  • Pokémon Go dérange culturellement dans certains pays comme par exemple l’Arabie Saoudite comme décrit ici ou encore la Turquie comme détaillé dans cet article.
  • Et si vous n’êtes toujours pas convaincus que ce jeu peut peut-être causer de l’inquiétude sur beaucoup de niveaux, jetez un oeil à cette histoire sordide.
Le mauvais goût à l’état pur.

J’ai vu des gens s’arrêter en voiture au milieu de la route pour observer des animaux sauvages dans des réserves naturelles au Canada, en Italie ou même en Suisse, mettant parfois en danger le usagers de ladite route. Ce n’est pas Pokémon Go qui crée ce phénomène de folie, c’est un phénomène tout à fait humain que de faire des choses stupides et dangereuses dans une optique de fascination quelconque. Cependant, le jeu vidéo n’est déjà pas extrêmement populaire dans les médias ou aux yeux de nos gouvernements. Quelle que soit votre opinion, l’inquiétude est là, les médias l’exploitent, et le débat ne fait que commencer.

Et après…?

Le 31 juillet dernier, Niantic a sorti la première mise à jour pour Pokémon Go. Quelles sont les premières modifications? Rendre plus difficile la capture de Pokémon, supprimant pour se faire la possibilité d’utiliser les services de type Pokévision et également le système de « pas » qui permettait aux joueurs d’estimer la proximité du trésor à attraper. Pourquoi rendre plus difficile les captures? Pour favoriser les achats de pokéballs dans l’application, évidemment. Les fans se plaignent, l’ombre d’une plongée est déjà visible.

Le mystère est complet. Pokémon Go est probablement le jeu vidéo (si tant est qu’on le définisse comme tel) le plus imprévisible de l’Histoire. Son succès peut s’estomper en quelques mois ou subsister plusieurs années. Les développeur vont-ils réussir à nourrir les joueurs avec du contenu tout en palliant aux divers problèmes et dangers que Pokémon Go implique? Ou bien vont-ils continuer à se concentrer sur l’appel commercial de leur succès et tout faire pour amasser quelques millions en plus? Niantic Labs, c’est vers vous que je me tourne, vous avez entre vos mains une bombe à retardement sans compteur ni marque de fabrique. Je ne pense pas que Pokémon Go soit une mauvaise chose a priori. Le terrain est inconnu, les incidents sont donc inévitables, les erreurs sont par conséquent excusables… dans un premier temps. Cependant, il s’agit du premier test de réalité augmentée à si grande échelle. Si ce test s’avère être un échec, alors l’avenir du jeu vidéo pourrait s’en trouver bouleversé. Bouleversé en bien ou en mal? Voilà le débat de demain.


Andreios

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