Il est de ces licences qui se maintiennent en vie de manière difficile, s’accrochant parfois désespérément en essayant de raviver la flamme d’une jeunesse perdue. Pour certains, c’est le cas de la série des Paper Mario. C’est sur la fin de vie de l’excellente Nintendo 64 que la licence a vu le jour avec l’opus éponyme de cette série, alors successeur spirituel de Super Mario RPG. Après une suite acclamée sur GameCube, gardant l’esprit de l’original en améliorant le gameplay et en étendant l’univers, les éléments RPG ont disparu petit à petit, laissant ainsi leur place à un gameplay axé sur un genre se rapprochant plus du jeu d’action/aventure. Super Paper Mario sur la Wii était carrément un jeu de plateforme avec quelques bribes de RPG, cependant, son scénario était le plus développé et mystifié de la série qui semblait avoir tout de même de beaux jours devant elle. Arrive Paper Mario: Sticker Star, sorti en 2012 sur Nintendo 3DS. Pour les fans de la série, dont moi, ce fut un coup de marteau énorme en pleine figure! L’univers attachant? Non. La diversité des rencontres et des personnages secondaires qui vous suivent? Non. Le système de combat dynamique lié à l’évolution du personnage? Non. Plus rien de ce qui faisait de Paper Mario une licence à part n’était présent. Mais, en 2016, Nintendo bluff le public et annonce Paper Mario: Color Splash, élu des dieux, sauveur de la série… ou catastrophe monumentale répétant les erreurs du précédent… tant d’incertitudes m’angoissaient presque à l’idée d’insérer le jeu dans ma console.
Développeur : Intelligent Systems
Editeur : Nintendo
Date de Sortie: 7 octobre 2016
Console(s) : Wii U
Genre : Action/Aventure
L’odorat
C’est avant la sortie du jeu que son odeur nous vient au narines, dès l’apparition du premier trailer. Mes amis, ça a jasé! La communauté des fans s’est mise à éviscérer le jeu sur place à coup de pouces rouges et de commentaires assassins… et c’est vrai qu’il a fait peur ce trailer. Prenant comme excuse d’innovation le concept de la couleur, le jeu semblait prendre la direction tant redoutée de son prédécesseur. Mais, comme pour Sticker Star, il me fallait vérifier par moi-même, il me fallait savoir si cette série que j’ai tant aimé auparavant pouvait reprendre ses couleurs d’antan. On débarque donc sur l’île Barbouille… déjà le nom… bref, passons. Les couleurs de l’île ont disparu et on vous fait comprendre assez vite que votre ami/ennemi (on ne sait plus trop après toutes ces parties de tennis et les derniers Jeux Olympiques…) Bowser a quelque chose à voir avec ça. À nous donc, à savoir Mario et son nouvel acolyte, Peinturion, un pot de peinture qui parle, de redonner à l’île Barbouille son prisme de couleur époustouflant. De prime abord, le scénario semble plus simpliste que les Paper Mario de la belle époque, mais on ne sait pas encore ce qu’il nous réserve réellement. On progresse dans les différents niveaux pour y trouver des petites étoiles de couleur qui permettront à Mario d’agrandir sa carte… et voilà ma première déception potentielle qui arrive, le jeu est-il linéaire? Je ne comprend pas le besoin d’une carte dans un Paper Mario, se rapprocher au final un peu plus d’un jeu Mario plus traditionnel est-il vraiment un bon choix? Cependant, les mécaniques sont innovantes et le « Marteau Splash » qui diffuse de la peinture jaune, bleu ou rouge, amène des possibilités d’énigmes et de puzzles intéressantes, il sera l’atout principal de Mario lors de cette aventure. Les combats semblent aussi avoir retrouvé un certain dynamisme et surtout une utilité qu’ils avaient perdu dans le dernier opus. Ceux-ci fonctionnent traditionnellement au tour par tour, on les gère avec un deck de cartes à jouer auxquelles ont peut ajouter de la couleur pour les rendre plus puissantes. Le système de combat de Sticker Star est donc repris et amélioré, le progrès se fait sentir malgré une gestion de l’inventaire parfois difficile (plus de détails plus tard).
Nous voilà donc embarqués dans une aventure qui semble plus trépidante que prévue, malgré quelques points noirs dont nous allons devoir faire abstraction.
Le toucher
Les contrôles de bases sont évidents et intuitifs, ils ne valent même pas la peine d’être détaillés car, finalement, un jeu Mario aura toujours des contrôles fluides et une prise en main facile. La partie intéressante réside ici dans l’utilisation du GamePad! Son écran est utilisé de deux manières différentes : pour la gestion de l’inventaire de cartes lors des combats et pour couper des éléments du décor, ce qui est parfois nécessaire pour avancer. La partie combat est, pour être franc, complètement inutile. La gestion des cartes sur le GamePad pourrait tout à fait être remplacée par un menu RPG plus traditionnel, et même si c’est un progrès par rapport au système de combat du jeu précédent, cela reste regrettable, quel était le problème avec le système de combat des premiers jeux? Choisir une commande et l’activer, c’est simple et efficace, c’est suffisant. La partie découpage est intéressante et offre de nouvelles possibilités dans le level-design. Cette qualité est malheureusement entachée d’incohérences flagrantes qui demandent au joueur une précision parfois digne d’un champion du monde de construction de château de cartes.
La vue
C’est probablement les graphismes qui sont le seul point positif que le trailer avait pu faire ressortir! Les textures de papier et de carton sont extrêmement bien pensées et bien utilisées, mariant parfaitement fantaisie et ingéniosité. Le jeu est très coloré (normal me direz-vous), mais ne fait pas mal aux yeux, la personnalité de Color Splash est exploitée à la perfection à ce niveau-là.
Lors des combats ou pendant notre aventure dans les niveaux, on fait parfois intervenir des éléments du monde réel à l’aide de cartes spéciales; extincteurs, ventilateurs, mégaphones ou encore boules disco sont parfaitement mis en scènes pour interagir avec les éléments du jeu. Très beau travail de l’équipe artistique, les animations de ces cartes sont des plus loufoques et le fond graphique s’adapte pour une mise en scène encore plus extraordinaire. Je vous conseille tout particulièrement la pile électrique… l’animation est aussi géniale que ridicule!
L’erreur principale dans la présentation de ce jeu se trouve au niveau du design des personnages, et plus particulièrement de la ribambelle infinie de Toads qui se courent après. Exemple simple : était-ce vraiment si compliqué de donner au Toad postier un sac de courrier? C’est vraiment dommage, car ce genre de détails enlève tant de personnalité au jeu qu’il en devient moins plaisant. Ainsi, Port Barbouille n’aura jamais le charme de Toadville, Port Lacanaille ou Recto.
L’ouïe
La bande son est impeccable, cela ne fait aucun doute. Nintendo a maintenant pris l’habitude de donner aux jeux Mario des sonorités très jazzies, et comme pour Super Mario 3D World ou Mario Kart 8, c’est très réussi.
J’ai été déçu de n’entendre pas plus de sons originaux. Les remix des sons de Super Mario Bros. et de ses successeurs commencent à être de trop. Finalement, Paper Mario n’a jamais eu besoin d’emprunter quoi que ce soit aux jeux plus classiques de la série Mario, pourquoi commencer maintenant?
Le goût
J’ai tout à fait apprécié Paper Mario: Color Splash pour ce qu’il est, c’est-à-dire une suite très améliorée de Paper Mario: Sticker Star. Il surpasse son prédécesseur de loin en incluant de nouvelles mécaniques sympathiques, en améliorant un peu le système de combat et, surtout, en créant un univers et des personnages un minimum attachant et plutôt drôles.
Cependant, lorsque le jeu est mis en perspective par rapport au reste de la série, ses faiblesses ressortent très vite : le système de combat est répétitif et très vite ennuyant, l’absence de compagnons qui vous suivent partout et qui s’incluent au gameplay est regrettable, le manque de variation dans les personnalités des PNJs est affligeante, le retour des Koopalings comme boss à chaque chapitre est très peu innovant et semble simplement paresseux de la part des concepteurs, mais surtout, l’environnement n’a pas retrouvé cette cohérence qui en faisait un monde un peu à part dans l’univers Mario. Les niveaux sont tous complètement différents, l’atmosphère n’y est jamais la même (malgré le fait que l’on retrouve partout les mêmes Toads ternes et presque jamais originaux), on passe de la forêt à la plage tropicale en passant par je ne sais quel lieu désertique… c’est simplement un schéma de jeu Mario on ne peut plus classique. C’est malheureusement ce qui, pour moi, faisait du tout premier Paper Mario et de ses deux successeurs une expérience unique. Ce « royaume Champignon » avait enfin une cohérence, des liens entre les différents individus qu’on y trouvait, c’était carrément une petite société.
Paper Mario: Color Splash est-il un bon jeu? Oui, sans aucun doute, c’est une expérience sympathique et amusante d’environ 25 heures qui saura vous divertir et vous surprendre. Mérite-t-il de porter le nom de cette série qui a fait tant de souvenirs et d’émotions par le passé? Malheureusement, je crains bien que non.
Les pour et les contre
+ Des effets graphiques étonnants et très beaux. | – Faible rejouabilité. |
+ Une bande son bien composée et qui met dans l’ambiance. | – Système de combat inutilement compliqué. |
+ Un bon pas en avant depuis Sticker Star. | – Un manque flagrant de contenu neuf et original. |
+ On rigole bien! Surtout avec Peinturion. | – L’infini retour de ces saletés de Koopalings… |
+ Le concept des couleurs est intéressant et bien amené, offrant un gameplay varié. | – Peu de cohérence entre les niveaux, ce qui enlève beaucoup de personnalité au jeu. |
– Le retour de la série qu’on aimait tant, c’est pas pour tout de suite. | |
– Plus de partenaires sympathiques et attachants qui nous suivent dans notre aventure. |